vendredi 7 mars 2014

AENAON - Extance

AENAON


Extance




Black metal avant gardiste
Date de sortie: 20 janvier 2014
Label: Code666 Records


Tracklist:
1. The First Art
2. Deathtrip Chronicle
3. Grau Diva
4. A Treatise On The Madness Of God
5. Der Mude Tod
6. Pornocrates
7. Closer To Scaffold
8. Land Of No Water
9. Algernon's Decadence
10. Funeral Blues
11. Palindrome





Bon sang mais que se passe-t-il en Grèce en ce moment? Je veux dire, la situation politique, économique et tout ce qui va avec joue certainement un rôle sur l'inspiration des compositeurs. Woodstock n'aurait pas été le même sans guerre du Vietnam. La vague punk anglaise des années 70 n'aurait probablement été qu'un feu de paille si une certaine Margaret (Maggie pour les intimes) n'avait pas pointé son nez. Cependant le metal a traversé les âges sans vraiment se soucier de tout ça et est resté, sauf exceptions, un mouvement totalement apolitique. Alors comment expliquer que chaque nouvel album d'un groupe de metal grec, venant dont d'un pays qui connait depuis quelques temps des jours difficiles, soit une véritable bombe? Rotting Christ l'année dernière figurait déjà sur mon top 10 2013. Puis début janvier Suicidal Angels fait comprendre au monde entier qu'ils sont désormais les maîtres incontestés du thrash, digne descendants de Slayer (oui rien que ça). Quelques chros en arrière je vous parlais de Hail Spirit Noir et du potentiel énorme de son dernier rejeton (bien parti pour figurer sur mon top 10 2014 celui-là).
Le même jour, sur le même label, sortait un autre album. "Extance" par Aenaon. Comment ai-je fait pour passer à côté d'un album comme celui-ci? Moi, toujours en quête de nouveautés. Parce que là mes amis, question nouveautés, elles sont là et il va falloir être ouvert d'esprit pour adhérer à toute l'étendue musicale d'Aenaon.

Code666 est en effet un label qui depuis maintenant une quinzaine d'année s'est spécialisé dans tout ce que le metal extrême compte d'OVNI. Et surtout qui aura été le lanceur de quelques groupes les plus acclamés aujourd'hui dans les milieux underground. En vrac Negura Bunget, Manes, Amesœurs... Et c'est donc en Grèce que le petit label italien a vu son futur. M'est avis que c'est une bonne pioche.

Si Aenaon est classé dans l'avant garde ou encore le progressif, cela va encore au delà. Vous en connaissez beaucoup vous, des groupes de black metal qui intègrent dans leurs compositions à la fois symphonies, jazz, blues voire de l'harmonica? Rien n'est cependant dans l'excès. Comme pour leurs compatriotes de Hail Spirit Noir, tout est dans le dosage, savamment orchestré de manière à ce que les plans les plus étrangers au black metal coulent de source au milieu de morceaux brutaux et incisifs. Prenez "Deathtrip Chronicle" par exemple. Ce morceau révèle à lui seul une bonne partie des capacités du groupe prenant à contre-pied son auditoire avec des changements constants dans sa structure métallique, elle même coupée d'une section jazzy où saxophone et clavier psyché s'entremêlent pour finalement laisser la place à d'envoûtantes guitares, ces dernières fournissant le dernier effort par un retour à des riffs psychédéliques complexes, soutenus de nouveau par la section cuivre. Puis le final, retour sur le thème principal avec une facilité déconcertante. Dans le même ordre d'idée, "Land Of No Water" (avec Mirai Kawashima de Sigh en guest vocal) n'est pas en reste. Si vous vous demandiez comment incorporer de l'harmonica sur une pièce de metal extrême, ne cherchez plus: la réponse se trouve ici. De même, "Closer To Scalffold" sonne comme un cri désespéré précédant le naufrage dans la folie la plus totale.

Aenaon n'en oublie pas pour autant son devoir de nous offrir un album rageur. "Grau Diva" est en ce sens l'un des morceaux les plus accessibles. Plus simple dans ses fondations, cette diva (le morceau est une ode à la dualité et l'état sexuel confus de la condition humaine, tout un programme!) offre des passages mélodiques retentissants d'une rare qualité. Le refrain, dépouillé, est une belle réussite dans le genre "je te rentre dans la tête et n'en sors plus". Les orchestrations sont superbement travaillées de même que les transitions entre la partie acoustique et le reste du morceau. Plus brutal encore, "Der Mude Tod" est une incroyable avalanche de riffs ravageurs, dans la plus pure tradition black mais avec de très belles parties de chant clair (offertes par Sindre Nedland des groupes Funeral et In Vain) et d'hallucinantes envolées de saxophone.

L'album se termine sur 2 longues pièces, chacune apportant son lot de surprises à un album déjà multi-facettes notamment "Funeral Blues" dont la progression lente et psychédélique, magnifiée par la prestation vocale de Tanya Leontiou (Universe127)  en fait l'un des morceaux les plus intéressants de l'album, théâtral tout autant qu'insidieux. 

Les guitares possèdent un son sombre et grandiose, se proposant comme pièces principales ou des ponts entre tous les changements stylistiques . Le mélange efficace de synthés, saxophone , les solos de guitare bluesy et guitare acoustique fait de "Extance" l'un des albums les plus riches qu'il m'ait été donné d'écouter depuis pas mal de temps. Un album complet et complexe, très complexe, mais recelant une multitudes de trésors cachés. Malgré les couches d'instruments et d'effets utilisés, tout apparaît clairement, les transitions sont transparentes et la musique reste très cohérente. Il faut aussi mentionner la performance très ciblée des voix claires et des solos qui parsèment l'album, ça et là avec des interventions toujours intelligemment placées. Rajoutez à cela 2 petits interludes en milieu de parcours qui, même si très courts, donnent des instants de répit bienvenu, faisant respirer un peu le tout. Magistralement exécuté, "Extance", c'est tout simplement de la "schizophrénie musicale organisée".


Highlights: "Deathtrip Chronicle" "Funeral Blues"





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